Développer son attachement sécure

Développer son attachement sécure

Il est avant tout essentiel de garder à l’esprit qu’un style d’attachement a beau être stable dans le temps, il n’en est pas moins plastique, c’est-à-dire qu’il peut bouger. Il est en effet  possible d’acquérir un attachement sécure à l’âge adulte, malgré les difficultés qu’on a pu rencontrer dans la vie. Cette évolution peut se faire au contact de personnes à l’attachement sécure – on considère ainsi qu’au sein du couple, il peut s’acquérir en deux à quatre ans.

Malheureusement, c’est souvent l’inverse qui se produit : des styles relationnels insécures ont tendance à s’attirer et à se renforcer mutuellement. Vous pouvez vous référer à d’autres articles sur ce site internet dans lesquels je donne des éléments de compréhension sur ce vaste sujet.


Combinaisons d’attachement dans le couple : les styles Anxieux/ambivalent et Évitant


Qu’est-ce que l’attachement sécure ?

Chez l’enfant, l’attachement sécure se met en place lorsque l’adulte qui s’occupe de lui – pour simplifier, nous dirons “la mère” – répond à l’expression de ses besoins de façon adéquate et sensible. Dan Siegel (The Whole-Brain Child, 2011) parle des quatre “S”, qui constituent les bases de la parentalité à partir desquelles l’enfant développe un sentiment interne de sécurité. Les enfants ont besoin d’être :

  • Seen (vus) : les regarder avec les yeux mais surtout les voir profondément et avec empathie, percevoir ce qui se cache derrière leur comportement
  • Safe (en sécurité) : éviter toutes les actions qui risquent de les effrayer ou leur faire du mal
  • Soothed (apaisés) : les aider à faire face à des émotions ou des situations difficiles
  • Secure : les aider à développer un sentiment interne de bien-être

Cela se traduit également dans le sentiment d’avoir sa propre personnalité, d’être une personne bien séparée de ses parents tout en ayant accès à des moments de forte connexion. Lorsqu’on a un attachement sécure, les relations sociales et amoureuses paraissent apaisées et stables. On est attentif à satisfaire nos propres besoins tout en étant sensible et tourné vers ceux des personnes significatives qui nous entourent (partenaire, amis, famille…).

John Bowlby avait déjà fait l’hypothèse que l’attachement sécure est biologiquement programmé en chacun de nous. Les perturbations qui surviennent au cours de la vie viennent donc enfouir cette sécurité interne, mais elle reste présente et accessible. Le chemin est plus ou moins tortueux, les traumas lorsqu’ils sont répétés voire chroniques viennent compliquer ce travail, pourtant, il est bel et bien possible de revenir à un attachement sécure.

Identifier les personnes sécures qui gravitent autour de soi

Nous avons tous dans notre entourage au moins une personne qui présente un attachement sécure : une amie, un voisin, un oncle… quelqu’un dont la façon d’envisager l’existence est assez apaisée, dont les relations sont stables, durables et peu conflictuelles. Un adulte à l’attachement sécure se reconnait par ses aptitudes relationnelles :

  • Se sent concerné par le bien être de son partenaire : il est attentif aux besoins de son conjoint autant qu’aux siens, sans compétition.
  • Gère les conflits paisiblement : le désaccord ou la dispute ne donnent pas lieu à des comportements défensifs ou d’attaque. Les conflits sont abordés avec équité.
  • Est à l’aise avec la proximité : les contacts physiques et l’intimité sont appréciés.
  • Ne cherche pas spécialement à fixer des limites : ne se sent pas étouffé par la présence de l’autre ET se sent à l’aise avec l’indépendance : accepte sans difficulté que le partenaire ait des activités et des amitiés indépendamment du couple.
  • Est disponible : répond aux sollicitations de sa partenaire, se montre bienveillant et à l’écoute.
  • Pardonne facilement : convaincu que les intentions profondes de l’humain sont bonnes, il lui est facile de tourner la page et de pardonner.

Prenez le temps d’observer ces personnes autour de vous et repérez avec le plus de précision possible les attitudes relationnelles à l’œuvre dans ce que pouvez observer de leurs relations :

  • Comment font-ils pour gérer les conflits ?
  • Comment réagissent-ils lorsque leur partenaire ne va pas bien ?
  • Quelle liberté s’accordent-ils mutuellement ?
  • Que choisissent-ils d’ignorer ?
  • À quoi décident-ils de répondre ?

De toutes ces observations rassemblées, certaines feront plus écho que d’autres par rapport aux difficultés relationnelles que vous rencontrez dans votre vie. Choisissez celles que vous aimeriez intérioriser. Voici quelques exemples de comportements relationnels des adultes à l’attachement sécure :

  • Se montrent disponibles
  • Se sentent concernés par le bien-être de leur partenaire
  • Communiquent clairement leur ressenti
  • S’intéressent au ressenti de leur partenaire
  • Lors d’un conflit, ne généralisent pas, mais restent axés sur le problème actuel
  • Ne manipulent pas
  • Sont indépendants, tout en appréciant les moments en couple

Reconnaître ses propres “Modèles internes opérants”

Dans un précédent article sur l’attachement et la parentalité, j’ai expliqué ce que sont ces “modèles internes opérant” et comment ils se forment.


Style d’attachement et parentalité


Pour résumer, ce sont des schémas de pensée que l’on a sur soi-même et sur le monde. Ils sont stables à travers le temps… mais encore une fois, eux aussi sont plastiques ! Ils peuvent être positifs et dire quelque chose comme “Je sais que je peux compter sur mes proches” ou ils peuvent être négatifs et dire “Je passe toujours au second plan”.

Ces pensées plus ou moins explicitées sont à l’œuvre dans les choix relationnel que l’on fait, ce dans quoi on choisit plus ou moins de s’embarquer en quelque sorte : on a en effet tendance à aller chercher dans les relations une confirmation de ces modèles internes opérant. Voir à ce sujet Comment notre style d’attachement influence-t-il nos relations ?

Pour identifier ces schémas de pensée et les actions qui en découlent, Levine & Heller proposent de passer en revue toutes nos relations amoureuses, d’en décrire les caractéristiques et de repérer les répétitions. Voici deux versions imaginées selon deux types d’attachement différents :

Style d’attachement anxieux-ambivalent :

Attachement anxieux MIO

Style d’attachement évitant :

Attachement évitant MIO

Le but de cet exercice est d’identifier les principes relationnels d’attachement à l’œuvre dans votre relation (présente ou passée) et de percevoir comment les stratégies qui en découlent sont porteuses d’insécurité.

La dernière colonne doit être pensée en relation avec les personnes sécures que vous avez identifiées : Comment réagiraient-elles à votre place ? Quels conseils pourraient-elles vous donner ?

Sur le chemin de la sécurité intérieure

Un style d’attachement se développe au fil du temps, à travers un nombre incalculable d’interactions avec un caregiver. Que l’on se situe sur une tendance sécure, évitante ou anxieuse, ces adaptations sont profondément ancrées dans l’organisme, dans les pensées que l’on a sur soi-même et les réponses émotionnelles qui y sont associées. Bien sûr, modifier un tel fonctionnement ne se fait pas en un jour.

Avec de la pratique, vous serez en mesure de modifier par petites touches, quelques une des réactions générées automatiquement :

  • vous pourrez prendre du recul par rapport à vos émotions négatives et en comprendre le fonctionnement sous-jacent
  • vous mettrez en place de nouvelles façons de répondre à une situation activant / désactivant votre système d’attachement
  • vous comprendrez avec plus de finesse ce qui déclenche un comportement relationnel chez les autres et ne le prendrez pas nécessairement “personnellement”
  • sachant qu’il s’agit d’un fonctionnement qui a été approprié dans le contexte spécifique de votre passé (contexte familial, séparation précoce, procédure médicale, complication à la naissance, précarité, guerre…) mais qui n’a plus lieu d’être aujourd’hui, vous pourrez développer davantage de compassion pour vous-même

L’acquisition d’un attachement sécure modifiera progressivement votre vision du monde, de vous-même et de votre passé. Ce travail est difficile à entreprendre seul, il est donc conseillé de l’envisager à deux, au sein du couple (dans l’idéal, chacun travaillant sur ses difficultés et soutenant l’autre) ou bien en collaboration avec un individu identifié comme “base de sécurité” et qui accepte de vous guider dans vos questionnements. Les éléments renseignés dans le tableau seront également un matériau très utile à apporter en thérapie.

Cette petite voix intérieure qui vous critique : 3 stratégies pour la calmer


Laetitita Bluteau | laetitiabluteau.fr