Se séparer d’une relation toxique

se séparer d'une relation toxique psy-resilience.com

Par relation toxique, il sera question ici d’un piège relationnel dans lequel les protagonistes ont une façon opposée de rechercher la satisfaction de leurs besoins émotionnels :

  • l’un, poussé par la peur d’être abandonné, cherche à maintenir le maximum de proximité avec son partenaire (attachement anxieux/ambivalent)
  • l’autre, se sent étouffer par la présence et les besoins de son partenaire et met en place des stratégies de mise à distance (attachement évitant plus spécifiquement le sous-type distant “dismissive avoidant”)

Cette dynamique est abondamment abordée sur ce site. La plupart du temps, il n’est pas question de toxicité mais plutôt d’une insatisfaction ressentie des deux côtés. Les commentaires des intéressés vont dans le sens d’une lassitude de voir que l’incompréhension est profonde et mène à d’incessantes disputes.

Mais tout est question d’intensité. Lorsque la personne à l’attachement évitant se sent profondément envahie dans son intimité, que le ou la partenaire est perçue comme insupportablement intrusive, elle devient “l’ennemie” : à ce niveau, on peut parler de toxicité relationnelle.


Les dates des prochains ateliers en ligne sont disponibles à cette page : 

 

Ateliers en ligne


À quel moment ce binôme devient-il toxique ?

La personne à l’attachement anxieux qui essaie de se rapprocher du partenaire évitant franchit ainsi une ligne qui permet d’accéder à une trop forte intimité – et au-delà de laquelle ce dernier multiplie ses efforts de mise à distance par des stratégies de désactivation de l’attachement et avec des mots qui font mal, qui rabaissent, ridiculisent…

Voici quelques indices qui pourraient indiquer que vous êtes pris-e dans ce type de dynamique :

  • Vous avez honte de la façon dont vous traite réellement votre conjointe et vous faites en sorte que cela ne se sache pas
  • Lorsqu’il a besoin de prendre une décision importante, votre partenaire demande conseil à d’autres personnes que vous
  • Il y a un décalage entre la façon dont l’entourage perçoit votre couple et la réalité que vous vivez dans l’intimité
  • Vous êtes étonné d’entendre votre entourages, famille & amis, complimenter votre partenaire sur sa gentillesse, sa patience, sa générosité…
  • S’il vous arrive quelque chose de grave, vous n’êtes pas certain que vous serez la priorité de votre partenaire et qu’elle viendra près vous en urgence
  • Votre partenaire vous rabaisse ou vous insulte mais il se montre agréable avec les personnes extérieures

Si un partenaire sécure aide à vivre plus longtemps et en meilleure santé, le contraire est vrai : maintenir une relation dominée par le stress, dans laquelle on se sent piégé altère la santé psychologique mais aussi physique. Au Danemark des chercheurs ont notamment interviewé des personnes sur la qualité de leurs relations interpersonnelles. La question concernait le niveau de conflit vécu au quotidien : “Dans votre vie quotidienne, êtes vous – toujours, souvent, parfois, rarement, jamais – en conflit avec les personnes suivantes : partenaire, enfants, famille, amis, voisins ?”. Onze ans plus, tard, 422 personnes sur les 10 000 interviewées sont décédées. Parmi elles, les chercheurs ont montré que les personnes ayant répondu “toujours” ou “souvent” étaient deux à trois fois plus représentées. D’autres recherches appuient cette hypothèse selon laquelle les conflits et l’exposition répétée au stress dégradent la santé… ou tuent !

Pourquoi est-il si difficile de quitter ce type de relation ?

Pour une personne qui a l’habitude de vivre des relations houleuses, marquées par des pics d’intensité très forts, il peut être compliqué de percevoir la réalité de la dégradation du couple. Les difficultés rencontrées sont souvent banalisées, sur un registre selon lequel la satisfaction totale dans le couple est une chimère… l’idéal n’existant pas, il faut faire avec cette réalité ! Le cheminement qui mène à admettre que non, cette situation n’est ni banale ni souhaitable pour quiconque, demande du temps.

Le système d’attachement est activé par la peur. Chez le petit enfant, c’est la peur qui déclenche le besoin de proximité avec le caregiver. Les pleurs et les cris sont alors activés afin de ramener la figure d’attachement à proximité. Dans les styles d’attachement insécures (anxieux/ambivalent, évitant et désorganisé) cette boucle mène soit à une hyperactivation (encore plus de cris accompagnés de protestation) soit à une désactivation (extinction de la manifestation des besoins) du système d’attachement :

Le système d'attachement chez l'adulte

La boucle relationnelle “insécure” se renforce dans l’insécurité : plus la situation active la peur (d’être abandonné, de ne pas être assez bien etc.), plus le système d’attachement est activé (anxieux/ambivalent) – ou désactivé (évitant).

Comme le dit le proverbe, “l’amour est aveugle” : lorsque le système d’attachement est activé, on devient généralement peu perspicace quant à la réalité de la relation : avant toute considération, c’est le besoin de sécurité qui prime, même si les stratégies mises en place pour l’obtenir apportent paradoxalement l’inverse. Au niveau cérébral, cette activation a pour effet d’inhiber les parties du cerveau permettant l’accès à la réflexion, à l’analyse.

Dans ce type de dynamique relationnelle, la tentative de séparation s’accompagne de deux phénomènes très difficiles à outrepasser :

  • Une douleur insupportable : Se séparer de sa figure d’attachement, cela fait mal, très mal. L’imagerie cérébrale indique que c’est une douleur tout à fait comparable à ce que l’on peut ressentir lorsqu’on se fait une fracture.
  • Un afflux massif de souvenirs positifs : Tout ce qui semblait négatif est balayé par une déferlante de souvenirs heureux… les quelques sourires, attentions, marques de tendresse viennent totalement recouvrir l’accumulation de souffrance, comme si elle paraissait désormais moins terrible.

Pour la personne qui tente de se séparer, il est donc extrêmement difficile de faire face à ces deux phénomènes et de renoncer à retrouver la personne aimée. Bien souvent, plusieurs tentatives seront nécessaires avant de définitivement se décider à partir.

Lorsqu’il est temps de partir

La préparation : Sachant qu’il s’agit d’un processus douloureux et complexe, la séparation doit se penser en amont. Il peut être très utile de faire un point sur la réalité : noter les remontrances, les humiliations, les paroles blessantes, les mises à distance et parfois les insultes sous forme de journal. Les moments plus agréables, également reportés par écrit, permettent d’une part de comparer avec plus d’objectivité le volume de chacun et d’autre part de se rendre compte de quoi se nourrit le besoin d’y croire.
Ce travail permettra de faciliter des échanges plus authentiques avec des personnes de confiance, sur la réalité de cette relation : ces personnes deviendront des alliées essentielles sur lesquelles pourra se reporter un système d’attachement désorienté.

Le départ : Étant donné l’état d’urgence dans lequel le système d’attachement se trouve suite à une séparation, s’accompagnant du besoin irrépressible de retrouver la personne quittée, il est souhaitable de prendre refuge chez un ami ou un parent qui sera capable de calmer cet élan en apportant d’une part suffisamment d’attention et de présence – et d’autre part en rappelant la réalité de la souffrance vécue lorsque des fléchissements se présenteront. Le recours aux écrits consignés lors de la préparation pourront à nouveau s’avérer bien utiles.

Développer son attachement sécure



Laetitia Bluteau | laetitiabluteau.fr